Histoire en queue de poisson. (AI avril 2024)
Oui il y a eu des loupés pour ceux qui suivent, faute d’internet suite à un déménagement. Pour ceux qui se demandent où, bin toujours dans ce monde.Ce mois-ci ça se passe chez carnet Paresseux
Pisciflorville le 18 avril 2024.
Mon cher Xénophon,
Je m’ennuie à mourir. Tu le sais, j’ai beaucoup pleuré lorsque les combats pour la conquête du monde de Nemo ont cessé. Tamerlan et Attila, eux n’ont pas versé une seule larme. J’ai la nostalgie de notre gang des daurades. Mais comme on ne mâche pas un chewing-gum qui n’a plus de jus dedans, je t’écris pour te conter une autre histoire.
Ce matin, alors que je peignais ma girafe avec application du haut de mon escabeau, j’ai remarqué que j’avais une araignée au plafond. Elle m’a fait peur, avec ses yeux plus gros que le ventre ! J’en suis tombée à la renverse, en plein dans les pommes, qui à leur tour ont roulé dans la farine. Le canard aux trois pattes cassées s’est mis à rire, j’étais tellement vexée que j’ai attrapé un marteau et lui ai cloué le bec. Quel début de journée !…Et je n’étais pas au bout de mes déconvenues. Non seulement plus de compote de rhubarbe-pomme, mais en plus dans ma turbotière, cuisaient des harengs. Ils râlaient d’être mitonnés aux petits oignons qui leur faisaient pleurer les globes oculaires. J’ai alors mis une langue de terre dans ma turbotière pour en faire une jardinière à herbes aromatiques. Et dans la jardinière-soupière, j’ai planté les poissons. C’est là que ça a coincé. Les harengs ont vu fleurir des plumes de paons multicolores sur leur nageoire caudale. Les poissons ont déposé par les yeux jaunes ( non pas des crocodiles, mais de leurs rémiges) des écailles bien visqueuses sur le sol de la cuisine et pour la deuxième fois de la journée j’ai fait une pirouette-galipette, me retrouvant sur mon popotin. Suite à ce ramasse-fesses, mon regard a été attiré par un mouvement sur la droite. Ils étaient deux. Un piaf, sur un monticule de riz pilaf qui se la jouait chef d’orchestre. Muni d’un tuba, il distillait quelques notes d’un concerto pour Mozart. Et l’autre ostrogot, un merlu qui faisait des ronds dans l’eau de cuisson, l’eusses-tu cru, mon vénérable Xénophon ? De facto, de plomb en hameçon, je constatais que mes nageoires se transformaient en doigts et orteils. Sous le choc, je perdis connaissance et plongeai dans une eau trouble où flottaient les poissons clowns de mes rideaux de cuisine. Soudain j’ai entendu une sonnerie glougloute, mais c’était le vieux taxiphone vintage de ma déco. Curieuse j’ai dit Allô, le plus gros des harengs sort du combiné un tentacule de calamar. C’était pas le moment de m’adonner à la paresse si je ne voulais pas boire le bouillon ou pire me retrouver en sushi sur les étals de Vierzon. J’ai commencé à nager, mais à contre-courant je pédalai dans la bouillabaisse. C’est alors qu’une des ventouses, du tentacule du calamar a causé.
─ Hey, toi à l’araignée au plafond, tu crois qu’il y a combien de brasses de ta pataugeoire au rebord de la marmite ? Deux, cinq mouvements de grenouille ?
─ Sais pas, mais je veux prendre la tangente et pas, par les quatre chemins aux quatre nages.
Si toute cette histoire te donne le mal de mer, bin moi elle m’attriste car mon araignée s’est empiffrée la mouche du coche qui passait par là, prise dans la toile de la vilaine. Puis l’estomac repu, elle s’en est allée, me laissant seule avec des jardinières où poussent des harengs-paons.
Voilà à quoi j’en suis réduite mon vénérable Xénophon pour me donner un peu d’adrénaline depuis que j’ai déposé les armes.
Ta dévouée sœur d’arme.
Alexandra Paracanthurus.
18 Comments
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Lisez poisson, votez Vierzon (agenda ironique d’avril) – Carnets Paresseux
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Le vote des poissons (agenda ironique d’avril) – Carnets Paresseux
Quel texte riche en trouvailles amusantes ! C’est du : Alice au pays de Boris Viandox.
John Duff
Merci John, tu me fais rougir avec tes comparaisons 🙂
Excellent !! il y a de tout et même un peu plus, John a raison !!
et du surfin, du premier (an)choix pas des xenophon de tiroir !
et Dory a la fin !
comme bande son, je ne vois que le concerto d’hareng-rouez (https://www.youtube.com/watch?v=-oxH-7VklBI)
merci Mijo !!
Merci Carnet, oui j’y ai pensé au concerta hareng-rouez 🙂 Ton sujet était un régal.
Ah, génial, je retrouve ton humour avec ce florilège de jeux de mots. On nage et on se régale dans cette marmite de poissons et crustacés cuits aux petits oignons !
Belle soirée.
Marie Christine
Merci Marie-Christine de ta fidélité à me suivre dans mes élucubrations littéraires 🙂
Les harengs-paons font la roue….. et la roue tourne ! la soupe sera bien « touillée » 😉 Alexandra a-t-elle oublié ses attributs de chirurgien pour délivrer la mouche ? va falloir lui rafraîchir la mémoire !
Ah je n’avais pas pensé aux attributs de chirurgien, bien vu Gibu 🙂
Le non-sens a fleuri ce mois-ci, on dirait !
Bravi bravo pour toutes ces trouvailles !
Merci de ton passage Licorne 🙂
Eh bien, que de trouvailles et d’expressions idiomatiques, ça bouillonne dans la marmite ! Tout ça en peignant sa girafe matinale ! Ah, merci pour ce texte foufou ! Belle journée à toi, Sabrina.
Merci Sabrina, je ne pensais que de me laisser aller à la folie d’une araignée au plafond enthousiasmerait autant mes camarades de l’AI
Nan mais vraiment, c’est un pur délice rebondissant, une véritable ostrogotherie, une pantagruellerie de burlesque et tentacules, quel spectacle réjouissant.
L’inspiration était au rendez-vous !
Super.
WAOUH! Merci de ce florilège et au passage j’apprends « ostrogotherie ». A bientôt chez vous pour l’AI de mai 🙂
J’ai adoré votre histoire pleine de peps qui, avec le thème de la métamorphose, m’a incitée à retourner chez Ovide et Kafka … d’un pas léger cette fois-ci. Y’a de la couleur chez miss Mijo Nouméa! 🙂
Merci Lyssa Mara de votre enthousiasme 🙂
Moi aussi j’ai pensé à Vian en lisant ce texte déjanté à souhait! On se laisse flotter en eaux troubles avec plaisir 👍
Merci de la comparaison 🙂