Pince sans rire.
Cette semaine le jeu de Chroniques Atmosphériques est : Écrire un texte sous deux angles différents à partir de la photo suivante : une partie sous l’angle de la nature et l’autre sous l’angle des pinces à linge !
Youpi c’est le printemps, nous piaffions d’impatience dans le panier, prêtes aux bains de soleil. Nous avions revêtu nos plus belles robes de couleur vives ou pastel, quand le drame est arrivé. Juliette, notre lavandière préférée, celle qui utilisait le savon à la lavande, puis qui nous disposait sur le fil près du lavoir, en prenant soin de nous assortir à chaque vêtement qu’elle étendait, nous délaissa pour des nouvelles venues. Pour un sale coup, c’est une véritable trahison. Nous qui avions vu nos ancêtres de bois conçues, relégués aux travaux manuels dans les écoles, condamnés à ne plus connaître les chauds rayons du soleil, ni humer l’herbe tendre, ni entendre le chant des oiseaux, avec pour seule compagnie la colle blanche, pâteuse et toxique. Nous savions bien que l’arrivée de ces pinces à linge à fleurs ou avec des coccinelles ou des abeilles allaient nous donner du fil à retordre. C’était cousu de fil blanc, nous étions sur le fil du rasoir à défaut du fil à linge. Il était urgent de réagir et de sortir notre épingle du panier.
Youpi c’est le printemps, c’est la fête au jardin comme dans le monde végétal. Du moins en apparence.
─ Mes articulations branchées vont pouvoir se réchauffer au soleil. Fini la solitude, effeuillé jusqu’au bois. A moi, la musique des chants d’oiseaux et les amoureux qui viendront se bécoter en savourant mes cerises.
─ Moi, je me réjouis des baisers qui seront échangés sous la tonnelle verte de ma robe de tilleul.
─ Nous jonquilles et narcisses, attendons d’être ramassés par brassée. Nous sommes heureux de porter du jaune la couleur de la joie dont nous parfumons les maisons.
─ Ouais sauf que le jaune est aussi la couleur des cocus, minauda la primevère, fière d’être la première à fleurir sur le vert des prés.
─ Je hais ce printemps, car avec lui c’est le retour de mon effeuillage, juste pour savoir si l’on est aimé, un peu, beaucoup, passionnément ou pas du tout.
─ Parle pour toi, moi j’ai passé tellement de temps coincé dans ce corset vert, que j’ai besoin de respirer et de m’étirer pour déplier feuilles ou fleurs selon mon humeur de bourgeon.
─ Moi ci, moi là, non mais vous ne pouvez pas voir un peu plus loin que le bout de votre canopée ou de votre corolle ? Vous ne voyez pas le drame qui se joue pour nous, pinces à linge de plastique ? Sous prétexte de sauver la planète, une campagne contre notre communauté, puisque nous ne pouvons pas être recyclées est engagée. Les humains ont donné vie à une nouvelle génération d’épingles à linge biodégradables, avec des motifs à fleurs, coccinelles ou abeilles pour célébrer le printemps.
─ Allons mesdemoiselles, foi de mimosa, vous savez bien que depuis que le monde est monde, la justice est moribonde. Vous n’avez plus les faveurs, vous les fidèles compagnes des lavandières êtes victimes d’abandon, mais rassurez-vous, même si vous êtes délaissées dans l’oubli, les humains reviennent toujours à leurs premières amours. Profitez de ces vacances, pour prendre le temps de vivre et filer à l’anglaise vers d’autres cordes à linge où vous serez accueillies comme des vintage.
Quel texte rafraichissant, plein de jeux de mots et d’astuce, vraiment très plaisant !
Merci MH, je suis fan de vos textes aussi 🙂
Intéressante conversation entre fleurs et épingles! Bravo!
Il est vrai que tout est affaire de mode et que les bannies d’aujourd’hui seront peut-être les stars de demain ! J’ai beaucoup aimé la conversation de tous ces végétaux !
Belle et douce soirée !
merci Sandra,
c’est stimulant pour poursuivre dans l’écriture fantaisiste 🙂
L’oeil affûté, on peut dire que vous l’avez également et de plus avec une belle touche d’humour et de fantaisie rafraîchissante pour l’avènement du printemps…sous la neige. Ce texte est magnifique et votre blog lumineux. Bizh !
Sous la neige le printemps, oh my god, seriez vous dans l’Est de l’hexagone? Je vous souhaite un astre de lumière et de chaleur vite de retour. merci de vos compliments. Vous avez raison l’écriture nécessite une longue et fine observation tous nos sens en alerte de ce qui nous entoure.
Excellent ces dialogues! On sourit tout au long du texte. Un vrai bon moment encore une fois Mijo.
❤
Merci Marie à toi d’impulser des situations d’écritures originales 🙂